dimanche 31 mars 2013
La vérité de la vérité? (?!?) (1)
Puis-je dire ( de) la vérité quand je mens?
Si l'on prend le cas des "préfaces fictionnelles" chères à G. Genette (Seuils ...), moi, écrivain, je mens à mes lecteurs en leur fournissant une piste de lecture que je sais être fausse ( Voltaire, Candide : " feuillets retrouvés ds la poche du Dr Ralph...")...
Ce faisant, j'ajoute toutefois un supplément de vraisemblable à mon oeuvre; le lecteur n'est pas dupe ( quasi personne à l'époque de Voltaire!), mais il se doute, ce lecteur en "connivence" (mais si!), que même si le récit déborde de caricatures, d'outrances et d' "invraisemblances", il représente qd même le tremblement de terre de Lisbonne en 17.., et stt le comportement imbécile de l'Inquisition à cette époque!!
Cette part de vérité-là, "historiquement avérée", intègre non seulement les faits mais aussi, et stt, l'OPINION de l'auteur sur ces faits ( car "il est vrai" - "histor aver"(!!!) - que Voltaire considérait les membres du Très Saint Tribunal de la Très Sainte Inquisition comme une bande de crétins malfaisants!!)...
Ainsi, la préface "toute en feintise" (pffffff... Schaeffer) surligne cette clause, non-dite mais ô combien entendue pour qui lisait Voltaire, : "Je vous mens d'abord pour mieux vous dire certaines vérités ensuite..."... Paradoxe apparent, confirmation du caractère vraisemblable de la fiction, se tramant autour du réel comme une parodie autour du texte de référence, et indiquant au lecteur, en un "clin d'oeil" littéraire, que "si toute vérité n'est pas bonne à dire", le lecteur sortira de la fiction lesté de qques vérités sur son époque...
"Mais pour rien au monde, nous dit aussi Voltaire, je ne suis prêt à passer le moindre jour en prison pour tes beaux yeux, lecteur!"... Autre vérité de l' époque, relevant cette fois de la place de l'écrivain ds la société du XVIIIe: conseiller des Princes mais aussi membre "actif", au moins pour une partie, de l' Encyclopédie; philosophe mais aussi grand reporter, témoignant, à coups de "gags fictionnels" ( relisez les intitulés des chapitres!!!) de l' état de son siècle... A ses risques et périls!!
A suivre...
" Comment la fiction nous dit-elle le réel?"(1)
Txt
Comme l'écrit Eric Hobsbawm (L'Age des extrêmes, Ed. Monde diplo/ Complexe, Bxl,1999), "(...) Pourquoi de brillants créateurs (...) notoirement non analytique, réussissent-ils parfois ( souvent???) mieux à anticiper la forme des choses à venir que les professionnels de la prédiction? C'est l'une des questions les plus obscures de l'histoire et (...) l'une des plus centrales."(AE, p239)
Très modestement, mais poussé dans le dos par la proximité de la pension ( "Faut tout sortir!!"), de qques dizaines d'années de "pratique" sur le "terrain" scolaire, face (!?) à des milliers d'Es, je me dis que je peux "oser" tenter de formuler qqs élts de réponse à ces "obscures" mais si stimulantes questions, que l'on peut réduire à une seule : comment l'art rend-il compte du monde, et plus spécifiquement :
" Comment la fiction nous dit-elle le réel?"
Pour commenter les rapports entre fiction et réel, il me semble indispensable d'introduire un "moyen terme", le concept de VERITE...
"Tout se passe comme si..." on ne pouvait accéder directement au réel, qu'on ne pouvait en traiter qu' à travers des intermédiaires, des modules de perception, dont la PENSEE et, d'un même coup, souhaité ou non, le LANGAGE...
Ne voulant noircir des pages sur les rapports pensée/ langage ( ce sera pour une autre vie), nous postulerons un "TRIANGLE HERMENEUTIQUE" Fiction - réel - vérité, et en déduirons la problématique "Comment la fiction formule-t-elle une/des vérité(s) sur le monde" , and so, we go...
"Comment la fiction formule-t-elle une/des vérité(s) sur le monde?"
Dans un de ces moments de "délire intuitif" dont je suis coutumier sur le coup de minuit, j'ai pu noter que:
"" Art et fiction étaient ts 2 "éléments de la réalité" ( je peux acheter une oeuvre d'art -format timbre-poste en ce qui me concerne; je peux de même acheter - ne mégotons pas pour qqs milliers d'euros!- le "story board" d'un Lang, des bouts de décor du "Quai des Brumes"...);
"" dès lors, Art et Fiction constituaient / transportaient / REPRESENTAIENT des "formes" de vérité, infiniment partielles et partiales, mais hautement "vraisemblables" , soit avec un fort taux d' adéquation avec certains éléments de réalité, constituant donc des simulacres soc acceptables de ces élts...
Ainsi, j'identifie aisément un laboureur, qque fort richement vêtu, ds "La chute d'Icare" de Breughel ( moins facilement des prostituées ds "Les demoiselles d'Avignon"!); il me semble reconnaître une scène de Ducasse ds le "Germinal" de Zola, ...
"" si je reprends le triangle philosophique CONCEPT- PERCEPT- AFFECT , rendu célèbre par au moins Deleuze, je peux établir les équivalences :
* vérité = concept
* représentation / simulacre = percept
* socialement admissible = affect
L' ensemble étant "interprétable" en tant qu' éléments de REALITE jugés "plaisants" ou "déplaisants", "bien vus" ou "loupés", "crédibles" ou "non-crédibles", sublimes ou ridicules, en zo voort...
NB: pour sortir du schéma "stimulus-réponse" svt décrit comme seule formulation "efficace" de la réalité et des réactions qu'elle suscite, ns rappellerons que toute perception est loin d'être "biologiquement automatique" : distrait, je peux ne pas m'apercevoir de suite que le feu vient de passer au vert; seuls les coups de klaxon , me surprenant, me feront avancer... De plus, je n'aurai guère la tête à couvrir les klaxonneurs d'insultes, plutôt penaud de ma distraction...
Dès lors, aucun aspect de la réalité n'échappe, en tout ou en partie, à la socialisation ( voire la "culturisation"), donc à une approche historique, donc à une fictionnalisation ( la "Mise en intrigue" chère à Ricoeur et moi-même), au moins sous forme dégradée de "storytelling"...
A suivre....
mardi 12 mars 2013
En italien...
METAFORA, TEMPO E RACCONTO
La recherche "linguistique", liée aux travaux de synthèse actuels, reconnaît de nouveaux phénomènes discursifs, soit la production de sens nouveaux à travers les procédures polysémiques , le pouvoir créatif de l'imagination et une réflexion sur la question du "temps", celui de l'Histoire comme celui de la fonction narrative et mimétique du récit, dans "La métaphore vive" et "Temps et récit"...
La teoria ricoeuriana si configura come una teoria filosofica rivolta prevalentemente a rivalutare il senso, il significato e la funzione ermeneutica ed ontologica della metafora viva al livello del discorso e non della semplice denominazione.
È attraverso la metafora, quale manifestazione e luogo di produzione del linguaggio creativo e veritativo, che noi uomini facciamo l'esperienza della metamorfosi del linguaggio e della metamorfosi della realtà.
Secondo Ricoeur, la necessaria revisione e critica della tradizione retorica della metafora sposta il problema della metafora da una semantica della parola ad una semantica del discorso.
Per Ricoeur, la “ scintilla di senso ” costituiva della metafora viva, cioè l'enunciato metaforico, vero e proprio “ poema in miniatura ”, è una “ predicazione bizzarra ”, un' “ attribuzione impertinente ”: un evento testuale e discorsivo che, carico di una potenzialità di ri-figurare la realtà e insieme capace di scoprire dimensioni nascoste dell'esperienza umana e di trasformare la nostra visione del mondo: un senso nuovo viene creato proiettando una nuova comprensione del mondo. La “verità metaforica”, sospendendo la “referenza” ordinaria per attivare quella secondaria, "divisa", "spezzata", contribuisce, come dice Ricoeur, a una ridescrizione del reale e, più generalmente, del nostro essere-al-mondo, la verità di un mondo ridescritto e riconfigurato "quelle del poter essere ” (“Dal testo all'azione”).
La riflessione sul rapporto fra temporalità, storia e funzione narrativa del racconto viene svolta da Ricoeur nell'imponente trittico di Tempo e racconto, dando così concretezza al disegno della “via lunga” dell'ermeneutica tra fenomenologia, epistemologia ed ontologia prospettata negli anni Sessanta. La problematica della funzione narrativa del racconto come luogo in cui il tempo diviene tempo umano è invece affrontata in due sezioni distinte:
l'una incentrata sulla configurazione, cioè sulle operazioni narrative operanti all'interno stesso del linguaggio (linguaggio ordinario, storia, finzione) nella forma della costruzione dell'intreccio dell'azione e dei personaggi;
l'altra sulla rifìgurazione, mostra che la temporalità richiede il discorso indiretto della narrazione - e una poetica della narratività, la quale, se ricollocata all'esperienza esistenziale della temporalità (nella sua dialettica di passato, presente e futuro).
L'idea direttrice generale, secondo Ricoeur, è che nel racconto il tempo viene organizzato, parimenti, solo l'esperienza temporale permette al racconto di divenire significativo: il racconto porta a compimento la sua corsa soltanto nell'esperienza del lettore, del quale esso “rifìgura” l'esperienza temporale.
Secondo questa ipotesi, il tempo è in qualche modo il referente del racconto, mentre la funzione del racconto è di articolare il tempo in modo da conferire ad esso la forma di un'esperienza umana. Come dice Ricoeur: “ Il mondo dispiegato da qualsiasi lavoro narrativo è sempre un mondo temporale. [...] Il tempo diviene tempo umano nella misura in cui è articolato in modo narrativo; per contro il racconto è significativo nella misura in cui disegna i tratti dell'esperienza temporale ” (“Tempo e racconto”).
Il problema che si pone è quindi quello del passaggio
dalla configurazione all'interno del testo del racconto,
alla rifigurazione del mondo reale del lettore,
fuori dal testo del racconto.
Nell'affrontare questo problema all'ermeneutica spetta pertanto il compito d'indagare il complesso delle operazioni che consentono all'autore del racconto di presentare al lettore la sua "storia", distinguendola dall'esperienza quotidiana, ma senza lacerare i fili che ad essa la connettono.
Nei confronti della costruzione dell'intrigo narrativo, l'ermeneutica, nel circolo tra racconto e temporalità, è dunque chiamata a svolgere una triplice “mimesis” intesa in senso dinamico come un processo attivo di imitazione e rappresentazione dell'azione. Imitazione creatrice nel triplice senso: “
- mimesi come precomprensione dell'azione, in quanto l'azione umana è già strutturata linguisticamente;
- mimesi come capacità dell'opera narrativa di configurare, di dare forma al mondo delle azioni umane;
- mimesi, infine, come capacità dei testi narrativi di alimentare una nuova prassi di ri-figurare l'azione.(...)
La recherche "linguistique", liée aux travaux de synthèse actuels, reconnaît de nouveaux phénomènes discursifs, soit la production de sens nouveaux à travers les procédures polysémiques , le pouvoir créatif de l'imagination et une réflexion sur la question du "temps", celui de l'Histoire comme celui de la fonction narrative et mimétique du récit, dans "La métaphore vive" et "Temps et récit"...
La teoria ricoeuriana si configura come una teoria filosofica rivolta prevalentemente a rivalutare il senso, il significato e la funzione ermeneutica ed ontologica della metafora viva al livello del discorso e non della semplice denominazione.
È attraverso la metafora, quale manifestazione e luogo di produzione del linguaggio creativo e veritativo, che noi uomini facciamo l'esperienza della metamorfosi del linguaggio e della metamorfosi della realtà.
Secondo Ricoeur, la necessaria revisione e critica della tradizione retorica della metafora sposta il problema della metafora da una semantica della parola ad una semantica del discorso.
Per Ricoeur, la “ scintilla di senso ” costituiva della metafora viva, cioè l'enunciato metaforico, vero e proprio “ poema in miniatura ”, è una “ predicazione bizzarra ”, un' “ attribuzione impertinente ”: un evento testuale e discorsivo che, carico di una potenzialità di ri-figurare la realtà e insieme capace di scoprire dimensioni nascoste dell'esperienza umana e di trasformare la nostra visione del mondo: un senso nuovo viene creato proiettando una nuova comprensione del mondo. La “verità metaforica”, sospendendo la “referenza” ordinaria per attivare quella secondaria, "divisa", "spezzata", contribuisce, come dice Ricoeur, a una ridescrizione del reale e, più generalmente, del nostro essere-al-mondo, la verità di un mondo ridescritto e riconfigurato "quelle del poter essere ” (“Dal testo all'azione”).
La riflessione sul rapporto fra temporalità, storia e funzione narrativa del racconto viene svolta da Ricoeur nell'imponente trittico di Tempo e racconto, dando così concretezza al disegno della “via lunga” dell'ermeneutica tra fenomenologia, epistemologia ed ontologia prospettata negli anni Sessanta. La problematica della funzione narrativa del racconto come luogo in cui il tempo diviene tempo umano è invece affrontata in due sezioni distinte:
l'una incentrata sulla configurazione, cioè sulle operazioni narrative operanti all'interno stesso del linguaggio (linguaggio ordinario, storia, finzione) nella forma della costruzione dell'intreccio dell'azione e dei personaggi;
l'altra sulla rifìgurazione, mostra che la temporalità richiede il discorso indiretto della narrazione - e una poetica della narratività, la quale, se ricollocata all'esperienza esistenziale della temporalità (nella sua dialettica di passato, presente e futuro).
L'idea direttrice generale, secondo Ricoeur, è che nel racconto il tempo viene organizzato, parimenti, solo l'esperienza temporale permette al racconto di divenire significativo: il racconto porta a compimento la sua corsa soltanto nell'esperienza del lettore, del quale esso “rifìgura” l'esperienza temporale.
Secondo questa ipotesi, il tempo è in qualche modo il referente del racconto, mentre la funzione del racconto è di articolare il tempo in modo da conferire ad esso la forma di un'esperienza umana. Come dice Ricoeur: “ Il mondo dispiegato da qualsiasi lavoro narrativo è sempre un mondo temporale. [...] Il tempo diviene tempo umano nella misura in cui è articolato in modo narrativo; per contro il racconto è significativo nella misura in cui disegna i tratti dell'esperienza temporale ” (“Tempo e racconto”).
Il problema che si pone è quindi quello del passaggio
dalla configurazione all'interno del testo del racconto,
alla rifigurazione del mondo reale del lettore,
fuori dal testo del racconto.
Nell'affrontare questo problema all'ermeneutica spetta pertanto il compito d'indagare il complesso delle operazioni che consentono all'autore del racconto di presentare al lettore la sua "storia", distinguendola dall'esperienza quotidiana, ma senza lacerare i fili che ad essa la connettono.
Nei confronti della costruzione dell'intrigo narrativo, l'ermeneutica, nel circolo tra racconto e temporalità, è dunque chiamata a svolgere una triplice “mimesis” intesa in senso dinamico come un processo attivo di imitazione e rappresentazione dell'azione. Imitazione creatrice nel triplice senso: “
- mimesi come precomprensione dell'azione, in quanto l'azione umana è già strutturata linguisticamente;
- mimesi come capacità dell'opera narrativa di configurare, di dare forma al mondo delle azioni umane;
- mimesi, infine, come capacità dei testi narrativi di alimentare una nuova prassi di ri-figurare l'azione.(...)
doc Dans les années 1960-1970, la réflexion de Ricoeur renvoie principalement à la thématique du conflit des interprétations insurmontable qui oppose les herméneutiques du soupçon (Marx, Nietzsche, Freud), aux herméneutiques qui sont à la recherche d'une compréhension téléologique et amplificatrice, d'un surplus de sens (Hegel, Jaspers, Nabert,...).
Dans les derniers travaux, elle subit un remaniement théorique important. Vers le milieu des années 1970, en effet, l'herméneutique des symboles se transforme en herméneutique des textes. Pour lui, cette tension même fait partie de l’interprétation : « Expliquer plus, c’est comprendre mieux » (TA, p. 22). Car le sens d’un texte peut dans le même temps répondre précisément à un contexte donné, et répondre à des questions radicales, vivantes en tous temps.
D’un côté l’herméneutique mesure ainsi la distance introduite par les langages et l’histoire (distance entre nos contextes et ceux auxquels répondaient ce texte). De l’autre elle rappelle l’appartenance irréductible du sujet interprétant au monde qu’il interprète (appartenance du sujet interprétant à la même question que le texte interprété). Cette équation d’appartenance et de distance donne peut-être la bonne distance pour une lecture crédible. L’originalité de Ricœur consiste à ne pas séparer l’ontologie herméneutique des traditions issue de Heidegger et Gadamer, et la critique des idéologies de Habermas ou l’exégèse historique (TA p. 362) : « Comment fonder les sciences historiques face aux sciences de la nature ? Comment arbitrer le conflit des interprétations rivales ?
L'attention plus forte prêtée aux médiations textuelles ouvre la voie à de nouvelles recherches d'une grande fécondité, aussi bien ontologique que pratique. En ancrant sa conception du texte dans la notion de discours (« quelqu'un dit quelque chose à quelqu'un sur quelque chose »), Ricœur découvre trois nouveaux grands chantiers philosophiques :
- la médiation par l'empire objectif des signes,
- la reconnaissance d'autrui impliquée dans l'acte d'interlocution,
- le rapport au monde et à l'être.
Par la suite, avec Du texte à l’action, Ricœur ne s’est pas tenu à cette herméneutique critique, et y a adjoint de plus en plus une herméneutique poétique. C’est d’abord que « Grâce à l’écriture, le discours acquiert une triple autonomie sémantique :
- par rapport à l’intention du locuteur,
- à la réception par l’auditoire primitif,
- aux circonstances économiques, sociales, culturelles de sa production » (TA, p. 31).
L’étude littéraire des configurations proprement poétiques du texte (métaphores, récits, etc.) fait voir une vérité du texte en aval, comme une interrogation neuve qu’il glisse dans les présuppositions admises, et qui lui permettent de bouleverser les contextes successifs de sa réception. De même qu’une sorte de référence seconde est ouverte au monde, le lecteur accède ainsi à une « naïveté seconde », post-critique : « La subjectivité du lecteur n’advient à elle-même que dans la mesure où elle est mise en suspens, irréalisée, potentialisée. La lecture m’introduit dans les variations imaginatives de l’ego. La métamorphose du monde, selon le jeu, est aussi la métamorphose ludique de l’ego. » (TA p. 117).
Enfin la pointe de cette poétique est éthique, c’est une invitation à habiter et à agir le monde : « Qu’est-ce qui reste à interpréter ? Je répondrai : interpréter, c’est expliciter la sorte d’être-au-monde déployé devant le texte. » (TA p. 114).
Ricœur parle d’une greffe de l’herméneutique sur la phénoménologie, comme si la démarche de remontée à l’originaire butait et se retournait vers le monde déjà là : « Dès que nous commençons à penser, nous découvrons que nous vivons déjà dans et par le moyen de "mondes" de représentations, d’idéalités, de normes. En ce sens nous nous mouvons dans deux mondes : le monde prédonné, qui est la limite et le sol de l’autre, et un monde de symboles et de règles, dans la grille duquel le monde a déjà été interprété quand nous commençons à penser » (AP, p. 295.).
Par ailleurs le dissensus herméneutique semble indépassable : « C’est seulement dans un conflit des herméneutiques rivales que nous apercevons quelque chose de l’être interprété : une ontologie unifiée est aussi inaccessible à notre méthode qu’une ontologie séparée (…) Mais cette figure cohérente de l’être que nous sommes, dans laquelle viendraient s’implanter les interprétations rivales, n’est pas donnée ailleurs que dans cette dialectique des interprétations » (CI p. 23-27).
Enfin notre condition herméneutique semble liée au fait central que chaque génération doit réinterpréter le monde où elle se découvre, et que les paroles et les écrits ne répondent à des questions qu’en en soulevant des nouvelles :
« Nous survenons, en quelque sorte, au beau milieu d’une conversation qui est déjà commencée et dans laquelle nous essayons de nous orienter afin de pouvoir à notre tour y apporter notre contribution » (TA p. 48).
doc « La métaphore est un travail sur le langage qui consiste à attribuer à des sujets logiques des prédicats "incompatibles" avec les premiers » (TA 19).
On peut distinguer les métaphores mortes, déjà sédimentées dans la polysémie admise par le lexique, et les métaphores vives, qui sont des émergences de langage, des innovations sémantiques. La métaphore vive cependant n’est pas un pur jeu d’un langage sans monde, qui se célèbrerait lui-même : « la métaphore est le processus rhétorique par lequel le discours libère le pouvoir de certaines fictions de redécrire la réalité » (MV 11). C’est pourquoi Ricœur parle de « vérité métaphorique ». C’est un des pivots de sa philosophie.
La démarche de Ricœur consiste à déplacer la question : non plus la métaphore-mot, dénomination déviante, mais la métaphore-énoncé, prédication impertinente : il y a moins substitution sémantique que tension entre des aires sémantiques hétérogènes, soudain rapprochées par l’attribution de prédicats ordinairement incompossibles avec le sujet. « Il y a alors métaphore, parce que nous percevons (..) la résistance des mots (..) leur incompatibilité au niveau d'une interprétation littérale de la phrase » (TA 20). « La ressemblance est alors la catégorie logique correspondant à l’opération prédicative dans laquelle le rendre proche rencontre la résistance du être éloigné ». (MV 249). Ce rapprochement inédit fait image : « L’image n’est pas un résidu de l’impression, mais une aurore de parole » (MV 272 ), et Ricœur parle d’un schématisme de l’attribution métaphorique dont la métaphore fait voir le jeu (MV 253).
Ricœur ne se borne pas à ce « travail de la ressemblance », car il déploie alors une théorie de la référence dédoublée ou poétique. « Il se peut que la référence au réel quotidien doive être abolie pour que soit libérée une autre sorte de référence à d’autres dimensions de la réalité » (MV 187). « Il se peut que l’énoncé métaphorique soit précisément celui qui montre en clair ce rapport entre référence suspendue et référence déployée, qui acquiert sa référence sur les ruines de ce qu’on peut appeler, par symétrie, sa référence littérale. » (MV 279). On peut ainsi parler d'une référence tensive, où la métaphore répare en quelque sorte la perte de singularité occasionnée dans le langage par l'attribution de prédicats (SA 40), et Ricœur écrit que « la mimésis est le nom de la référence métaphorique » (MV 308).
Ricœur n’hésite pas à parler de vérité métaphorique : « Pour démontrer cette conception ‘tensionnelle’ de la vérité métaphorique, je procèderai dialectiquement. Je montrerai d'abord l'inadéquation d'une interprétation qui, par ignorance du ‘n'est pas’ implicite, cède à la naïveté ontologique dans l'évaluation de la vérité métaphorique ; puis je montrerai l'inadéquation d'une interprétation inverse, qui manque le ‘est’ en le réduisant au ‘comme-si’ du jugement réfléchissant, sous la pression critique du ‘n'est pas’. La légitimation du concept de vérité métaphorique, qui préserve le ‘n'est pas’ dans le ‘est’, procèdera de la convergence de ces deux critiques" (MV 313) . Ainsi « Il faut introduire la tension dans l’être métaphoriquement affirmé » (MV 311). « Le paradoxe consiste en ceci qu'il n'est pas d'autre façon de rendre justice à la notion de vérité métaphorique que d'inclure la pointe critique du n'est pas (littéralement) dans la véhémence ontologique du est (métaphoriquement) » (MV 321).
L’expression véhémence ontologique mérite d’être soulignée. Elle renvoie au thème de l’affirmation et de l’attestation. Mais ici elle désigne une protestation, au nom de la rigueur même des analyses sémiotiques, contre une idéologie structuraliste alors excessive (La métaphore vive est publié en 1975), dont le mot d’ordre est la clôture du signe. Ricœur soutient au contraire « l’éclatement du langage vers l’autre que lui-même : ce que j’appelle son ouverture » (CI 68). « S'il est vrai que tout emploi du langage repose sur un écart entre les signes et les choses, il implique en outre la possibilité de se tenir au service des choses qui demandent à être dites, et ainsi de tenter de compenser l'écart initial par une obéissance accrue à la demande de discours qui s'élève de l'expérience sous toutes ses formes » (« Mimésis, référence et refiguration dans Temps et Récit », Etudes Phénoménologiques n°11, 1990, p.40).
... Ces "considérations" permettraient aussi de voir 'l'imaginaire social" comme un "englobant" (structure? champ? .....) de discours sociaux mutiples METAPHORISES, en tout ou en partie, lors de la mise en intrigue, pour donner corps au "monde du texte"...
(A mes yeux, notion capitale, même si formulée "naîvement" par un vieux bonhomme, un peu "kékè", mais qui a la bonne grâce de maintenir, contre vents et marées, la fonction référentielle de tout texte/poème/récit/ discours : comme Barthes disait : "Tout a un/du sens, ou rien n'en a", on devrait dire : " Tout texte est référentiel - "directement ou indirectement"- ou rien ne l'est") M., mars 2013.
Dans les derniers travaux, elle subit un remaniement théorique important. Vers le milieu des années 1970, en effet, l'herméneutique des symboles se transforme en herméneutique des textes. Pour lui, cette tension même fait partie de l’interprétation : « Expliquer plus, c’est comprendre mieux » (TA, p. 22). Car le sens d’un texte peut dans le même temps répondre précisément à un contexte donné, et répondre à des questions radicales, vivantes en tous temps.
D’un côté l’herméneutique mesure ainsi la distance introduite par les langages et l’histoire (distance entre nos contextes et ceux auxquels répondaient ce texte). De l’autre elle rappelle l’appartenance irréductible du sujet interprétant au monde qu’il interprète (appartenance du sujet interprétant à la même question que le texte interprété). Cette équation d’appartenance et de distance donne peut-être la bonne distance pour une lecture crédible. L’originalité de Ricœur consiste à ne pas séparer l’ontologie herméneutique des traditions issue de Heidegger et Gadamer, et la critique des idéologies de Habermas ou l’exégèse historique (TA p. 362) : « Comment fonder les sciences historiques face aux sciences de la nature ? Comment arbitrer le conflit des interprétations rivales ?
L'attention plus forte prêtée aux médiations textuelles ouvre la voie à de nouvelles recherches d'une grande fécondité, aussi bien ontologique que pratique. En ancrant sa conception du texte dans la notion de discours (« quelqu'un dit quelque chose à quelqu'un sur quelque chose »), Ricœur découvre trois nouveaux grands chantiers philosophiques :
- la médiation par l'empire objectif des signes,
- la reconnaissance d'autrui impliquée dans l'acte d'interlocution,
- le rapport au monde et à l'être.
Par la suite, avec Du texte à l’action, Ricœur ne s’est pas tenu à cette herméneutique critique, et y a adjoint de plus en plus une herméneutique poétique. C’est d’abord que « Grâce à l’écriture, le discours acquiert une triple autonomie sémantique :
- par rapport à l’intention du locuteur,
- à la réception par l’auditoire primitif,
- aux circonstances économiques, sociales, culturelles de sa production » (TA, p. 31).
L’étude littéraire des configurations proprement poétiques du texte (métaphores, récits, etc.) fait voir une vérité du texte en aval, comme une interrogation neuve qu’il glisse dans les présuppositions admises, et qui lui permettent de bouleverser les contextes successifs de sa réception. De même qu’une sorte de référence seconde est ouverte au monde, le lecteur accède ainsi à une « naïveté seconde », post-critique : « La subjectivité du lecteur n’advient à elle-même que dans la mesure où elle est mise en suspens, irréalisée, potentialisée. La lecture m’introduit dans les variations imaginatives de l’ego. La métamorphose du monde, selon le jeu, est aussi la métamorphose ludique de l’ego. » (TA p. 117).
Enfin la pointe de cette poétique est éthique, c’est une invitation à habiter et à agir le monde : « Qu’est-ce qui reste à interpréter ? Je répondrai : interpréter, c’est expliciter la sorte d’être-au-monde déployé devant le texte. » (TA p. 114).
Ricœur parle d’une greffe de l’herméneutique sur la phénoménologie, comme si la démarche de remontée à l’originaire butait et se retournait vers le monde déjà là : « Dès que nous commençons à penser, nous découvrons que nous vivons déjà dans et par le moyen de "mondes" de représentations, d’idéalités, de normes. En ce sens nous nous mouvons dans deux mondes : le monde prédonné, qui est la limite et le sol de l’autre, et un monde de symboles et de règles, dans la grille duquel le monde a déjà été interprété quand nous commençons à penser » (AP, p. 295.).
Par ailleurs le dissensus herméneutique semble indépassable : « C’est seulement dans un conflit des herméneutiques rivales que nous apercevons quelque chose de l’être interprété : une ontologie unifiée est aussi inaccessible à notre méthode qu’une ontologie séparée (…) Mais cette figure cohérente de l’être que nous sommes, dans laquelle viendraient s’implanter les interprétations rivales, n’est pas donnée ailleurs que dans cette dialectique des interprétations » (CI p. 23-27).
Enfin notre condition herméneutique semble liée au fait central que chaque génération doit réinterpréter le monde où elle se découvre, et que les paroles et les écrits ne répondent à des questions qu’en en soulevant des nouvelles :
« Nous survenons, en quelque sorte, au beau milieu d’une conversation qui est déjà commencée et dans laquelle nous essayons de nous orienter afin de pouvoir à notre tour y apporter notre contribution » (TA p. 48).
doc « La métaphore est un travail sur le langage qui consiste à attribuer à des sujets logiques des prédicats "incompatibles" avec les premiers » (TA 19).
On peut distinguer les métaphores mortes, déjà sédimentées dans la polysémie admise par le lexique, et les métaphores vives, qui sont des émergences de langage, des innovations sémantiques. La métaphore vive cependant n’est pas un pur jeu d’un langage sans monde, qui se célèbrerait lui-même : « la métaphore est le processus rhétorique par lequel le discours libère le pouvoir de certaines fictions de redécrire la réalité » (MV 11). C’est pourquoi Ricœur parle de « vérité métaphorique ». C’est un des pivots de sa philosophie.
La démarche de Ricœur consiste à déplacer la question : non plus la métaphore-mot, dénomination déviante, mais la métaphore-énoncé, prédication impertinente : il y a moins substitution sémantique que tension entre des aires sémantiques hétérogènes, soudain rapprochées par l’attribution de prédicats ordinairement incompossibles avec le sujet. « Il y a alors métaphore, parce que nous percevons (..) la résistance des mots (..) leur incompatibilité au niveau d'une interprétation littérale de la phrase » (TA 20). « La ressemblance est alors la catégorie logique correspondant à l’opération prédicative dans laquelle le rendre proche rencontre la résistance du être éloigné ». (MV 249). Ce rapprochement inédit fait image : « L’image n’est pas un résidu de l’impression, mais une aurore de parole » (MV 272 ), et Ricœur parle d’un schématisme de l’attribution métaphorique dont la métaphore fait voir le jeu (MV 253).
Ricœur ne se borne pas à ce « travail de la ressemblance », car il déploie alors une théorie de la référence dédoublée ou poétique. « Il se peut que la référence au réel quotidien doive être abolie pour que soit libérée une autre sorte de référence à d’autres dimensions de la réalité » (MV 187). « Il se peut que l’énoncé métaphorique soit précisément celui qui montre en clair ce rapport entre référence suspendue et référence déployée, qui acquiert sa référence sur les ruines de ce qu’on peut appeler, par symétrie, sa référence littérale. » (MV 279). On peut ainsi parler d'une référence tensive, où la métaphore répare en quelque sorte la perte de singularité occasionnée dans le langage par l'attribution de prédicats (SA 40), et Ricœur écrit que « la mimésis est le nom de la référence métaphorique » (MV 308).
Ricœur n’hésite pas à parler de vérité métaphorique : « Pour démontrer cette conception ‘tensionnelle’ de la vérité métaphorique, je procèderai dialectiquement. Je montrerai d'abord l'inadéquation d'une interprétation qui, par ignorance du ‘n'est pas’ implicite, cède à la naïveté ontologique dans l'évaluation de la vérité métaphorique ; puis je montrerai l'inadéquation d'une interprétation inverse, qui manque le ‘est’ en le réduisant au ‘comme-si’ du jugement réfléchissant, sous la pression critique du ‘n'est pas’. La légitimation du concept de vérité métaphorique, qui préserve le ‘n'est pas’ dans le ‘est’, procèdera de la convergence de ces deux critiques" (MV 313) . Ainsi « Il faut introduire la tension dans l’être métaphoriquement affirmé » (MV 311). « Le paradoxe consiste en ceci qu'il n'est pas d'autre façon de rendre justice à la notion de vérité métaphorique que d'inclure la pointe critique du n'est pas (littéralement) dans la véhémence ontologique du est (métaphoriquement) » (MV 321).
L’expression véhémence ontologique mérite d’être soulignée. Elle renvoie au thème de l’affirmation et de l’attestation. Mais ici elle désigne une protestation, au nom de la rigueur même des analyses sémiotiques, contre une idéologie structuraliste alors excessive (La métaphore vive est publié en 1975), dont le mot d’ordre est la clôture du signe. Ricœur soutient au contraire « l’éclatement du langage vers l’autre que lui-même : ce que j’appelle son ouverture » (CI 68). « S'il est vrai que tout emploi du langage repose sur un écart entre les signes et les choses, il implique en outre la possibilité de se tenir au service des choses qui demandent à être dites, et ainsi de tenter de compenser l'écart initial par une obéissance accrue à la demande de discours qui s'élève de l'expérience sous toutes ses formes » (« Mimésis, référence et refiguration dans Temps et Récit », Etudes Phénoménologiques n°11, 1990, p.40).
... Ces "considérations" permettraient aussi de voir 'l'imaginaire social" comme un "englobant" (structure? champ? .....) de discours sociaux mutiples METAPHORISES, en tout ou en partie, lors de la mise en intrigue, pour donner corps au "monde du texte"...
(A mes yeux, notion capitale, même si formulée "naîvement" par un vieux bonhomme, un peu "kékè", mais qui a la bonne grâce de maintenir, contre vents et marées, la fonction référentielle de tout texte/poème/récit/ discours : comme Barthes disait : "Tout a un/du sens, ou rien n'en a", on devrait dire : " Tout texte est référentiel - "directement ou indirectement"- ou rien ne l'est") M., mars 2013.
lundi 11 mars 2013
discours sociaux
Fragments de discours sociaux et txts litt
Au bout du cpte, si l'on cherche à "faire le compte" des intrusions du social ( IE l'espace-temps socio-culturel d'une époque) ds un txt litt Y, on est amené à y rechercher :
- les élts d'idéologie(s) de cette époque;
- les élts de discours sociaux relevant des croyances, lieux communs, ... en cours;
- les élts de représentations sociales;
- les élts symboliques appartenant à l'imaginaire collectif et contingent selon, not, les catégories sociales représentées ds
le txt Y;
- les aphorismes appartenants aux sous-entendus, présupposés, préjugés et stéréotypes de l'époque;
- les représentations mentales de "l'auteur", accessibles not à travers les élts biographiques et familiaux, le "background des "oeuvres" ( romans, poèmes, txts journalistiques,...);
- les élts liés à l'intertextualité, incluant la "bibliothèque mentale" de "l'auteur", mais aussi les contraintes spécif litt, le "genre" not;
- les contraintes liées aux démarches d'édition et de diffusion des "oeuvres" de même ordre, y compris les notifications d'un comité de lecture,...
- Et alii specifques...
Ce qui n'est pas une mince affaire... Et tout cela avt de prétendre avoir accès à la "littérarité" du txt Y, elle-même soumise à quantité de représentations, liées not à l" intégration" en "habitus" professionnel des "schèmes de perception du travail d'écrivain, de la représentation des lecteurs/trices "visés", des discours de pairs ( réception critique des "oeuvres" précédant le txt Y), de l'appartenance au mode de production "large" ou "restreinte"...
Car tte "oeuvre" est plus ou moins largement la production de ts ces "codes"/ fragments de dicours, svt contradictoires, plus ou moins bien "intégrés" ( "mis en intrigue", Ricoeur) , consciemment ou non, par "l'auteur"...
Cela laisse rêveur...
dimanche 10 mars 2013
Narration et lecture...
Une chercheuse/ un chercheur propose la réflexion suivante sur le concept de narration et son implication pour la démarche de lecture...
"Entrer dans le monde du récit". Le titre donné à cet article signale d'entrée de jeu une consonance avec les travaux de Paul Ricœur sur la narrativité. Je vais d'ailleurs montrer à quel point l'analyse narrative est redevable d'exister, entre autres, à Paul Ricœur. Mais, comme on le verra, de nombreux critiques littéraires et de nombreux théoriciens des sciences du langage, essentiellement américains, ont contribué à faire naître ce type de lecture qu'on dénomme l'analyse narrative. C'est toutefois à Ricœur que l'on doit la formule "monde du texte" (une formule qui dérive de la théorie des "mondes possibles", issue de la philosophie de Leibniz). Le monde du texte est ce monde que le récit propose et déploie devant lui, un monde qui a son intrigue, son réseau de personnages, son système de valeurs, ses codes de communication.
Tout texte aligne une série de représentations agencées selon un code; ce code doit être connu, ou alors appris par le lecteur, de façon à permettre le déploiement du monde du récit.
Car c'est bien le lecteur, la lectrice qui déploie le monde du texte par l'opération de lecture. C'est bien lui qui déroule le monde du texte à partir de ce que le texte dit, mais aussi de ce que le texte ne dit pas, donc à partir de ce qu'il présuppose implicitement.
Umberto Eco a développé dans Lector in fabula cette idée de la coopération interprétative du lecteur, une coopération que requiert le texte pour être lu, c'est-à-dire pour être déchiffré dans ce qu'il dit et dans ce qu'il laisse entendre.
Ma réflexion va porter sur ce point, exactement. Entre le récit et le monde du récit s'interpose une opération, qui est l'opération de lecture, par quoi le lecteur parviendra à construire et à habiter un univers que lui propose le texte. Mais sur quels éléments travaille la lecture ? Quelle stratégie le narrateur a-t-il pratiquée pour orienter la lecture ?
Quel jeu se déroule entre le dit du texte et son non-dit ? Par quels moyens le narrateur déclenche-t-il adhésion ou répulsion envers ses personnages ? Comment fait-il connaître son système de valeurs ? Que cache-t-il au lecteur ? Voilà le type de questions auxquelles s'intéresse l'analyse narrative.
L'analyse narrative s'attache à déterminer par quelles procédures le narrateur construit un récit que l'opération de lecture va déchiffrer pour en libérer l'univers narratif.
L'analyse narrative se donne ainsi les moyens d'identifier l'architecture narrative du texte qui, par l' opération de la lecture, va déployer ce monde où le lecteur, la lectrice est convoqué à entrer.
Voilà qui donne de quoi gamberger...
"Entrer dans le monde du récit". Le titre donné à cet article signale d'entrée de jeu une consonance avec les travaux de Paul Ricœur sur la narrativité. Je vais d'ailleurs montrer à quel point l'analyse narrative est redevable d'exister, entre autres, à Paul Ricœur. Mais, comme on le verra, de nombreux critiques littéraires et de nombreux théoriciens des sciences du langage, essentiellement américains, ont contribué à faire naître ce type de lecture qu'on dénomme l'analyse narrative. C'est toutefois à Ricœur que l'on doit la formule "monde du texte" (une formule qui dérive de la théorie des "mondes possibles", issue de la philosophie de Leibniz). Le monde du texte est ce monde que le récit propose et déploie devant lui, un monde qui a son intrigue, son réseau de personnages, son système de valeurs, ses codes de communication.
Tout texte aligne une série de représentations agencées selon un code; ce code doit être connu, ou alors appris par le lecteur, de façon à permettre le déploiement du monde du récit.
Car c'est bien le lecteur, la lectrice qui déploie le monde du texte par l'opération de lecture. C'est bien lui qui déroule le monde du texte à partir de ce que le texte dit, mais aussi de ce que le texte ne dit pas, donc à partir de ce qu'il présuppose implicitement.
Umberto Eco a développé dans Lector in fabula cette idée de la coopération interprétative du lecteur, une coopération que requiert le texte pour être lu, c'est-à-dire pour être déchiffré dans ce qu'il dit et dans ce qu'il laisse entendre.
Ma réflexion va porter sur ce point, exactement. Entre le récit et le monde du récit s'interpose une opération, qui est l'opération de lecture, par quoi le lecteur parviendra à construire et à habiter un univers que lui propose le texte. Mais sur quels éléments travaille la lecture ? Quelle stratégie le narrateur a-t-il pratiquée pour orienter la lecture ?
Quel jeu se déroule entre le dit du texte et son non-dit ? Par quels moyens le narrateur déclenche-t-il adhésion ou répulsion envers ses personnages ? Comment fait-il connaître son système de valeurs ? Que cache-t-il au lecteur ? Voilà le type de questions auxquelles s'intéresse l'analyse narrative.
L'analyse narrative s'attache à déterminer par quelles procédures le narrateur construit un récit que l'opération de lecture va déchiffrer pour en libérer l'univers narratif.
L'analyse narrative se donne ainsi les moyens d'identifier l'architecture narrative du texte qui, par l' opération de la lecture, va déployer ce monde où le lecteur, la lectrice est convoqué à entrer.
Voilà qui donne de quoi gamberger...
dimanche 3 mars 2013
Du sujet perturbé à l'objet disséqué
Du sujet perturbé à l'objet disséqué
"Les Experts" et la réification du "Moi"
Dans l'histoire du Récit Policier, plusieurs époques :
- "Maigret" et le modèle religieux de la confession ( ou les lieux communs de Mme Maigret érigés en "théorie de l'homme nu'");
- Hammet et le comportementalisme ( le monde du crime comme reproduction des conflits sociaux);
- Manchette et le "sujet dépassé" ( le chaos mental comme résultante du chaos social);
- Approche "humaine" du COUPABLE comme "Moi" ( trop?) complexe, à travers des " études de cas", comme dans "Derrick", "Columbo"
- Etc.........
Avec "Les Experts", c'est bien la conception Ruppert-Murdochienne ( la Fox) qui s'impose ds le RP : dissolution de la complexité du mobile ( et du Moi du criminel) et négationnisme de la Motivation ( I E , la complexité du sujet pensant)...
Ds cette représentation "en série", le "crime" ( comme sa scène) devient un système fermé, un acte démotivé qu'il s'agit non plus d'INTERPRETER, mais bien de RECONSTITUER ( image du "puzzle"), de DISSEQUER ( l'investigation comme processus nécrophilique), de RESOUDRE ( l'enquête comme équation/ problème)...
NB; ces diverses représentations étaient déjà présentes ds les formes antérieures du RP, mais au "cas par cas", assorties à d'autres modèles de COMPREHENSION...
La domination des modèles "Les Experts ", c'est bien l'éjection du RP de tte forme d'empathie pour privilégier l'approche médicale/comptable ( pharmaceutique: le crime doit être "nettoyé", la "scène" NORMALISEE)...
Le fonctionnement de l'enquête 'Experts", c' est la mise en oeuvre des innovations techniques couplée à la division du travail la plus pointue...
C'est donc l'abandon d'un processus de compréhension progressive d'une fiction ( hypothèse) afin de la valider comme "histoire", celle du crime ET du criminel, avec des motivations socialement vraisemblables ( donc bienséantes, recevables par "tous", du moins ds les séries "prime time")... C'est aussi l'abandon "humain" du COUPABLE comme "Moi" ( trop?) complexe, même réduit à " l'étude de cas" comme dans "Derrick", "Columbo" ( autre époque du RP; à ajouter ds "Etc") ... La fin de l' empathie... (A suivre...)
"Les Experts" et la réification du "Moi"
Dans l'histoire du Récit Policier, plusieurs époques :
- "Maigret" et le modèle religieux de la confession ( ou les lieux communs de Mme Maigret érigés en "théorie de l'homme nu'");
- Hammet et le comportementalisme ( le monde du crime comme reproduction des conflits sociaux);
- Manchette et le "sujet dépassé" ( le chaos mental comme résultante du chaos social);
- Approche "humaine" du COUPABLE comme "Moi" ( trop?) complexe, à travers des " études de cas", comme dans "Derrick", "Columbo"
- Etc.........
Avec "Les Experts", c'est bien la conception Ruppert-Murdochienne ( la Fox) qui s'impose ds le RP : dissolution de la complexité du mobile ( et du Moi du criminel) et négationnisme de la Motivation ( I E , la complexité du sujet pensant)...
Ds cette représentation "en série", le "crime" ( comme sa scène) devient un système fermé, un acte démotivé qu'il s'agit non plus d'INTERPRETER, mais bien de RECONSTITUER ( image du "puzzle"), de DISSEQUER ( l'investigation comme processus nécrophilique), de RESOUDRE ( l'enquête comme équation/ problème)...
NB; ces diverses représentations étaient déjà présentes ds les formes antérieures du RP, mais au "cas par cas", assorties à d'autres modèles de COMPREHENSION...
La domination des modèles "Les Experts ", c'est bien l'éjection du RP de tte forme d'empathie pour privilégier l'approche médicale/comptable ( pharmaceutique: le crime doit être "nettoyé", la "scène" NORMALISEE)...
Le fonctionnement de l'enquête 'Experts", c' est la mise en oeuvre des innovations techniques couplée à la division du travail la plus pointue...
C'est donc l'abandon d'un processus de compréhension progressive d'une fiction ( hypothèse) afin de la valider comme "histoire", celle du crime ET du criminel, avec des motivations socialement vraisemblables ( donc bienséantes, recevables par "tous", du moins ds les séries "prime time")... C'est aussi l'abandon "humain" du COUPABLE comme "Moi" ( trop?) complexe, même réduit à " l'étude de cas" comme dans "Derrick", "Columbo" ( autre époque du RP; à ajouter ds "Etc") ... La fin de l' empathie... (A suivre...)
Inscription à :
Commentaires (Atom)