mardi 26 février 2013

3 mimésis pour le prix d'une...

Les trois Mimesis formulées par Ricœur (1983).

Tout récit s’enracine dans une première mise en forme de l’action, celle des histoires ou des fragments d’histoires de la vie quotidienne. Le récit prend son origine dans le monde de la vie qui est déjà chargé d’évaluations éthiques puisqu’il s’agit presque toujours d’amour ou de violence de générosité ou de lâcheté (Mimesis I).

Au niveau de la Mimesis II, c’est-à-dire de la mise en intrigue proprement dite, la dimension éthique apparaît clairement. La tragédie – enseigne Aristote – a pour sujet les tribulations d’un homme « semblable à nous » qui passe du bonheur au malheur et qui est malheureux sans le mériter. En élargissant de la tragédie à d’autres genres littéraires, on pourrait dire que pour que des histoires valent la peine d’être racontées, il faut qu’il arrive des histoires aux personnages. Mais ces histoires ne sont pas seulement des problèmes à résoudre, ce sont également des épreuves. C’est donc de l’intérieur de l’œuvre qu’est ménagé un espace d’identification dans lequel le spectateur de la tragédie éprouvera de la crainte et de la pitié pour ce qui n’arrive pas seulement qu’aux autres. 


C’est pourquoi, du côté de Mimesis III, de la reconfiguration de l’œuvre dans la réception, lire une histoire ce sera porter des évaluations éthiques. Certes il ne s’agit pas encore de jugements moraux. La lecture peut bien se situer au-delà ou en deçà du bien et du mal. Évaluation éthique veut dire ici que la littérature constitue pour le lecteur un « laboratoire » où lui sont présentés des possibles de vie. Un récit n’est pas seulement reçu comme un jeu intellectuel, mais comme l’évocation d’une expérience de vie qui interpelle et l’auteur et le lecteur...


A suivre!! 

vendredi 15 février 2013

Interprétation et communication


A.  La communication linguistique ne se réduit pas à un simple schéma...
1) Les mots sont pour la plupart porteurs de dénotations mais aussi de connotations, qui interfèrent dans la "simple" compréhension du message;
2) Les phrases ne peuvent être réduites à la simple addition des mots; tout comme le "tout est plus que les parties", la phrase, dans sa totalité/complexité, en dit plus que la succession des mots...

B. A la suite de Benveniste, il faut réaffirmer que:
-  «La nature essentielle de la langue, qui commande toutes les fonctions qu’elle peut assumer, est sa nature signifiante. (...) Mais qu’est-ce que signifier ?» Pour répondre, il faut d’abord s’enquérir des «éléments qui se partagent ce caractère signifiant», à savoir les «segments de langue» que sont les signes.
Mais puisqu’existent des signes de toutes sortes, naturels, graphiques, sonores, gestuels, etc., la linguistique ne peut pas se désindexer de la «science des signes», la sémiologie. C’est pourquoi Benveniste s’intéresse d’abord aux fondateurs de l’une et de l’autre, Ferdinand de Saussure et Charles Sanders Peirce, et procède à une lecture critique de leurs théories, en en soulignant les limites.
Mais il est un autre écueil : la langue «non seulement est faite de signes», mais est «productrice de signes», au sens où «le système qui la compose engendre lui-même de nouveaux systèmes dont la langue est l’interprétant». Ou plutôt: le système qui la compose est utilisé - par qui? ds quelle(s) intention(s), ds quel(s) contexte(s) - pour engendrer de nouveaux (mini) systèmes, dont la langue ( plutôt les usages des locuteurs)  est (sont) l’interprétant  ...
 Dès lors les sources de la «signifiance» deviennent multiples, sinon inextricables.
On en est donc réduit à distinguer deux aspects du langage, celui dans lequel le langage apparaît comme  a) un ensemble d’énoncés et celui de b) la production d’énoncés réalisée par l’acte discursif que chaque locuteur accomplit au moment où il parle. Il faut  donc adjoindre à la linguistique classique, qui a pour objet le texte même de l’énoncé, une «linguistique de l’énonciation», capable de définir le cadre formel d’«engendrement» du sens, et exigeant donc davantage qu’une analyse des éléments linguistiques (phonèmes, monèmes, mots…) ou des règles (phonétiques, morphologiques, syntaxiques) : la prise en compte de l’acte individuel d’énonciation, l’Autre auquel dialogiquement il s’adresse (individu, groupe, institution…), la référence à un réel (physique, sociétal, politique…).
Ainsi s’effectue, comme l’a écrit Roland Barthes, l’«inscription de la personne dans le langage» - sinon le rapprochement avec d’autres «philosophies du dialogue», telles que celles de Martin Buber ou Levinas. Mais sans doute doit-on retenir que les études de l’interlocution, des systèmes et des procès de signification menées par Emile Benveniste - jusqu’aux Dernières leçons - dépassent la linguistique et la sémiologie pour se présenter comme acheminement vers une science de la société et de la culture. C’est pourquoi elles sont devenues le legs commun de toutes les sciences humaines. «Bien avant de servir à communiquer, la langue sert à vivre», disait-il.( Auteur cité: Robert Maggiori, Libération du 26/04/12)

C. L'interpénétration de ces dimensions du langage doitt amener tout qui "se paye de mots" à se confronter à la démarche ( loin d'être tot. mise à plat) de l'interprétation , des conditions de sa mise en oeuvre, du "comment" la mener sans en dépasser les "limites" (Umberto Eco)...

lundi 4 février 2013

Rappel .... Réel et/dans fiction

Rappel : pour bcp de structuralistes, le texte est «  un monde en soi », auto-suffisant, « coupé » parce que  déformant/mensonger, du monde réel ( d’où l’hypothèse d’un « métatxt fait de ts les textes, avec ses territoires et ses banlieues, domaines parallèles voire antagonistes, comme par exemple la paralittérature et ses « sous » genres, le polar et autres,…)
Dans cette tradition, le texte nous ment sur le monde, pire l’occulte : le texte fait écran à une perception critique, l’histoire ns séduit, les personnages ns subjuguent ( l’épouvantable identification ! ) et nous voilà mené en bateau sur les méandres, pleins de piranhas, de l’ imaginaire…

Selon une autre doxa, le texte est « œuvre ouverte », susceptible de toute/n’ importe quelle lecture : le lecteur est souverain ( vox populi ), à chacun son sens ( comme à chacun son avis, son opinion, ses pulsions «  au-delà du bien et du mal »…)
Mais l’instinct est grégaire, le sens unique, la lecture de masse … le « moi »  s’installe ds/sur le texte ; stimulé, excité par lui, j’en perds tout autant le sens du réel, cette saloperie qui résiste à mes rêveries, aux illusions romanesques, qui m’oblige à respirer de l’ air impur, à boire, manger, chier… tant d’ opérations peu littéraires, au bout du conte…

Peut-être alors faudrait-il, dans la foulée de Ricoeur, Eco, Deleuze and co, considérer que les œuvres, littéraires, picturales, musicales,… traitent du réel, en parlent ; mais d’un réel déjà perçu, reformulé par l’ »auteur », qui « complique » encore les « choses » en incluant un « narrateur-personnage » qui découpe davantage les portions/ parts de réel…
D’ où une glose sans fin sur le caractère « fiable », « vraisemblable », « authentique »… d’une œuvre, au mieux lue comme représentation, au pire comme document/reflet  du réel, en tout ou en partie…
Pour « dépasser » ces commentaires, formulons l’hypothèse que ctains auteurs ( faute de mieux) INTERPRETENT leur portion de réel ( plus « part du diable » qu’ « œuvre de Dieu  »), socio-historiquement déterminée.
Et peut-être ctains auteurs de polar en sont-ils davantage conscients, leur pers , stt ds le roman noir, récit par excellence de la DESILLUSION, étant d’abord des interprétants : face à une énigme, au double-jeu des indices, au(x) présumé(s) coupable(s), aux pseudo-témoins,… le flic/ privé DOIT décoder, réinterpréter, supputer, …en quête d’une solution, d’un dénouement, souvent partiel…
Foncièrement, un auteur de polar est jusqu’au cou dans l’interprétation…
Mais Manchette était aussi TRADUCTEUR, et ce travail était pour lui une mission quasi sacrée ( certaines « notes noires » en témoignent indubitablement…)
Conscient de la traîtrise du discours narratif sur le réel, Manchette en propose une apprche autrement prudente que nombre de nos auteurs : il y a là assurément une piste de RELECTURE…
Mettre à jour les procédures de cette « mission » de l’écrivain/interprète, tenter de discerner ce qu’elle sauve, garde et nous offre de cette part du réel,  nous en donne à lire/voir/savoir, nous en cache éventuellement, consciemment ou inconsciemment…
Manchette en savait quelque chose, des enjeux de la mise-en-intrigue ( Ricoeur ), et il « en a bavé » ; aux lecteurs/trices que ns sommes de reconsidérer l’œuvre comme « lecture active » d’un réel complexe, action en partie littéraire/esthétique, mais aussi socio-politique, donc MORALE : car il n’y a plus depuis lurette d’ INNOCENCE de l’art …
Entre intrigue et Histoire : Manchette ,sans doute, cherchait à fusionner ces deux aspects de tout récit, ; c’est sans doute encore une des obsessions de « La Princesse du Sang », préparée  par le voyage à Cuba d’un homme malade, prêt à payer de sa personne comme le Zola de « Germinal », le Hugo des « Misérables », Le Orwell des récits de Londres, le Dickens d »Oliver Twist »…
Manchette, tout au long des premiers chapitres des « Gens du Mauvais Temps », nous donne à lire une tripotée de notices historiques, fruits de tout sauf du hasard…
Pas plus qu’il n’y a de pur hasard dans l’odyssée de Bardamu ou l’abandon burlesque des hurlu-perdus de Beckett…
A nous, lecteurs/lectrices de prolonger l’œuvre : Ivy éclaire nos pas, la torche au poing, … filin de jour dans les ténèbres du chaos, étincelle d’ aventure dans les recoins des « Cargos du Crépuscule »…
Mais nous délirons quelque peu… Entretenons seulement les derniers feux de la lecture ; c’est aussi notre DEVOIR de « lumpenintellectuels » critiques : contre les mercenaires ou illuminés qui boutent le feu aux bibliothèques , contre ceux stt qui les payent en dollars ou vierges de paradis, à nous de lire et de gueuler, de lire et relire et gueuler encore, à contre-sens…  « It’s the price to pay »…

L’ interprète (1)


De la représentation comme interprétation

Objet : comme pas mal d’auteurs, mais plus que certains, J P Manchette ( consciemment ou inconsciemment ) fait plus que représenter : il interprète certains aspects du monde / réel  du/des lecteurs, donc le mien, le tien – le nôtre…

Rappel : pour beaucoup de structuralistes, le texte est «  un monde en soi », auto-suffisant, «  coupé » parce que  déformant/mensonger, du monde réel ( d’où l’hypothèse d’un « métatexte fait de tous les textes, avec ses territoires et ses banlieues , domaines parallèles voire antagonistes , comme par exemple la paralittérature et ses « sous » genres, le polar et autres,…)
Dans cette tradition , le texte nous ment sur le monde, pire l’ occulte : le texte fait écran à une perception critique, l’histoire ns séduit, les personnages ns subjuguent ( l’épouvantable identification ! ) et nous voilà mené en bateau sur les méandres, pleins de piranhas, de l’ imaginaire…

Selon une autre doxa, le texte est « œuvre ouverte », susceptible de toute/ n’ importe quelle lecture : le lecteur est souverain ( vox populi ), à chacun son sens ( comme à chacun son avis, son opinion, ses pulsions «  au-delà du bien et du mal »…)
Mais l’instinct est grégaire, le sens unique , la lecture de masse … le « moi »  s’installe ds/sur le texte ; stimulé, excité par lui, j’en perds tout autant le sens du réel, cette saloperie qui résiste à mes rêveries, aux illusions romanesques, qui m’oblige à respirer de l’ air impur, à boire, manger , ch… tant d’ opérations peu littéraires, au bout du conte…

Peut-être alors faudrait-il, dans la foulée de Ricoeur, Eco, Deleuze, considérer que les œuvres, littéraires, picturales, musicales,… traitent du réel, en parlent ; mais d’un réel déjà perçu, reformulé par l’ "auteur ", qui « complique » encore les « choses » en incluant un « narrateur- personnage » qui découpe davantage les portions/ parts de réel…
D’ où une glose sans fin sur le caractère « fiable », « vraisemblable », « authentique »… d’une œuvre, au mieux lue comme représentation, au pire comme document /reflet  du réel, en tout ou en partie…

Pour « dépasser » ces commentaires, formulons l’hypothèse que certains auteurs ( faute de mieux) INTERPRETENT leur portion de réel ( plus « part du diable » qu’« œuvre de Dieu  »), socio-historiquement déterminée.

Et peut-être certains auteurs de polar en sont-ils davantage conscients, leur pers , surtout ds le roman noir, récit par excellence de la DESILLUSION, étant d’abord des interprétants : face à une énigme, au double-jeu des indices, au(x) présumé(s) coupable (s), aux pseudo-témoins,… le flic/ privé DOIT décoder, réinterpréter, supputer, …en quête d’une solution, d’un dénouement, souvent partiel…
Foncièrement, un auteur de polar est jusqu’au cou dans l’interprétation…
Franck Bv))